Le G7 s’est mis d’accord sur un code de conduite destiné aux développeurs d’intelligence artificielle (IA). Les ministres ont demandé à l’UE d’accélérer la législation, tout en soulignant qu’une surréglementation pourrait être préjudiciable, notamment face à la concurrence de la Chine et des États-Unis. Lors du tout premier sommet mondial sur la sécurité de l’IA, des dirigeants politiques et économiques se sont réunis à Bletchley Park pour discuter et s’engager à coopérer.
Alors que le potentiel de l’IA suscite de nombreux espoirs, notamment en médecine, son développement est considéré comme largement incontrôlé. Cette semaine, l’IA a été au cœur de l’actualité avec le code de conduite volontaire du G7, une réunion trilatérale de ministres français, allemands et italiens à Rome, ainsi qu’un décret « historique » du président américain Biden et le sommet sur l’IA de Bletchley Park au nord de Londres.
Fin octobre, l’ONU a également mis en place un panel d’experts chargé de formuler des recommandations dans le domaine de l’intelligence artificielle, une technologie « au potentiel transformateur » mais qui comporte également des risques importants pour la démocratie et les Droits de l’homme. Le secrétaire général António Guterres a incité le panel à travailler en mode « course contre la montre » et à fournir d’ici fin 2023 des recommandations sur la réglementation de l’utilisation de l’IA, en mettant en évidence les risques et les opportunités qui y sont liés.
G7 : code de conduite volontaire pour les développeurs d’IA
Lundi, dans le cadre du processus d’Hiroshima sur l’IA, les pays du G7 (Allemagne, Canada, États-Unis, France, Italie, Japon et Royaume-Uni) se sont mis d’accord sur des principes directeurs internationaux et sur un code de conduite destiné aux entreprises et aux institutions qui développent des systèmes d’intelligence artificielle (IA). Ces lignes directrices visent à réduire les risques inhérents à cette technologie tels que la désinformation et les atteintes à la vie privée ou à la propriété intellectuelle.
Ce plan doit promouvoir le développement de systèmes d’IA « sûrs et fiables » au niveau international et « maîtriser leurs risques », précise la déclaration commune, qui demande aussi à tous les acteurs du secteur de l’IA de s’engager à respecter les lignes directrices.
Le G7 souligne le « potentiel innovant et transformateur » des systèmes d’IA avancés, et notamment des modèles génératifs tels que le chatbot ChatGPT, tout en reconnaissant la nécessité de « protéger les individus, la société et les principes communs » et de « placer l’être humain au centre ».
« Je suis heureuse d’accueillir les principes directeurs internationaux et le code de conduite volontaire du G7, qui reflètent les valeurs de l’UE pour la promotion d’une IA fiable. J’appelle les développeurs d’IA à signer et à mettre en œuvre ce code de conduite le plus tôt possible », a déclaré la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen. Elle a par ailleurs rappelé que « l’UE, déjà pionnière des questions de réglementation avec la loi sur l’IA, contribue également aux barrières de sécurité et à la gouvernance de l’IA au niveau mondial ».
UE : une réglementation excessive nuit à la compétitivité au niveau mondial
L’Allemagne, la France et l’Italie veulent coopérer plus étroitement sur le thème de l’IA afin que l’Europe puisse mieux faire face à la concurrence venue des États-Unis et de Chine. Le projet de loi de l’UE sur la réglementation de l’intelligence artificielle doit se baser sur une approche « favorable à l’innovation », ont déclaré lundi les ministres de l’Économie des trois grandes puissances économiques de l’UE, insistant sur la nécessité d’accroître les investissements dans les nouvelles technologies.
Après une réunion à Rome, les ministres de l’Économie Robert Habeck, Bruno Le Maire et le ministre de l’Entreprise et du Made in Italy Adolfo Urso ont salué la première loi sur l’IA au monde, qui doit être adoptée d’ici la fin de l’année. Dans une déclaration commune, ils ont toutefois affirmé qu’il était « de la plus haute importance de s’assurer que la législation dans l’UE soit conçue sans bureaucratie inutile, et que la bureaucratie existante soit réduite ».
La loi réglementerait l’IA en fonction du degré de risque : plus le danger pour les droits ou la santé de l’individu sera élevé, plus les obligations des systèmes seront importantes.
Les ministres n’ont cessé de souligner qu’en matière d’IA, l’Europe était concurrentielle au niveau international. Habeck a déclaré : « Nous n’avons pas à rougir. Nous avons des entreprises qui, dans de nombreux domaines, sont meilleures que les géants américains de la technologie. » Dans le même temps, il a appelé à des décisions plus rapides au niveau européen. « S’il faut attendre trois ans et demi, nous n’aurons plus aucune chance, a-t-il insisté. Nous finirons par réglementer un marché qui n’existe même plus. »
Le ministre français Le Maire a fait remarquer que les États-Unis investissaient actuellement dix fois plus d’argent dans l’IA que l’Europe. L’année dernière, les États-Unis ont investi 50 milliards d’euros (53 milliards de dollars) dans l’IA, l’UE 5 milliards et la Chine 10 milliards d’euros, a-t-il ajouté. Les trois ministres ont appelé à une simplification des procédures pour les projets transnationaux afin de soutenir les start-up européennes. Urso, animateur des discussions de lundi, a déclaré que l’IA serait une priorité pour la présidence du G7 assurée par son pays en 2024.
Fin octobre, le ministre bulgare de l’Administration numérique, Alexander Yolovski, a déclaré que l’UE devait réglementer l’utilisation de cette technologie, qui représente un risque élevé pour les droits fondamentaux et les valeurs européennes, sans pour autant la surréglementer.
Le Centre international de recherche sur l’intelligence artificielle (IRCAI) a ouvert ses portes en 2020 à Ljubljana, en Slovénie, sous l’égide de l’UNESCO. Cet été, la première université d’été européenne sur l’intelligence artificielle y a réuni plus de 630 participants de 42 pays.
« Les petits pays n’ont peut-être pas les ressources des grands acteurs, mais la spécialisation et l’engagement dans l’éducation et la recherche peuvent leur donner un avantage concurrentiel dans certains domaines de l’IA », a récemment déclaré la ministre slovène de la Transformation numérique, Emilija Stojmenova Duh.
États-Unis : décret « historique » sur la réglementation de l’IA, recherche de collaboration avec les alliés sur les règles internationales
Le président Joe Biden a promulgué lundi un décret sur la réglementation de l’intelligence artificielle qui vise à placer les États-Unis à la pointe des efforts mondiaux pour gérer les risques liés à cette technologie.
Cette injonction « historique » ordonne aux autorités fédérales d’établir de nouvelles normes de sécurité pour les systèmes d’IA. Selon une déclaration de la Maison-Blanche, les développeurs doivent également faire part au gouvernement américain des résultats de leurs tests de sécurité et d’autres informations importantes.
Royaume-Uni : le sommet de Bletchley Park, « débuts » ou « occasions manquées » ?
Mercredi, des dirigeants politiques et des techniciens se sont réunis pour le premier sommet du monde sur la sécurité de l’intelligence artificielle, et des pays tels que le Royaume-Uni, les États-Unis et la Chine se sont mis d’accord sur la « nécessité d’une action internationale ». La ministre britannique des Technologies, Michelle Donelan, a précisé que cette déclaration « mettait en évidence pour la première fois le fait que le monde s’unit pour identifier ce problème ».
L’objectif de la réunion, qui s’est tenue dans le parc historique de Bletchley, au nord de Londres, où a été déchiffré le code Enigma de l’Allemagne nazie pendant la Seconde Guerre mondiale, était de trouver un « consensus international » sur les défis de l’IA et les moyens de les relever ; pour le suivi, elle proposera la création d’un groupe international d’experts chargé d’établir des rapports périodiques.
Le Premier ministre britannique Rishi Sunak a justifié l’invitation faite à la Chine – un pays que certains accusent d’espionnage technologique – « parce qu’il est impossible de développer une stratégie sérieuse [sans y inclure] le potentiel mondial » du secteur.
Après le récent accord trilatéral entre l’Italie, l’Allemagne et la France, le sommet de Bletchley Park marque « le début d’un processus d’implication d’autres continents afin d’atteindre l’objectif espéré : une nouvelle alliance mondiale, comme pour le climat, sur les règles et les mesures de sécurité qui doivent être adoptées en réponse au défi de l’intelligence artificielle », a déclaré Urso.
Cependant, plus de 100 organisations, experts et activistes britanniques et internationaux ont publié lundi une lettre ouverte à Sunak dans laquelle ils qualifient le sommet d’« occasion manquée » et de trop axé sur les « big tech ». La coalition, qui comprend des syndicats, des groupes de défense des Droits de l’homme comme Amnesty International, et des voix de la communauté tech, a averti que « les communautés et les travailleurs les plus concernés par l’IA ont été marginalisés » et que les invitations étaient « sélectives et limitées ».
L’IA en dehors de l’Union européenne
En Europe, les pays qui ne sont pas directement impliqués dans les questions réglementaires telles que la loi européenne sur l’intelligence artificielle ou la réunion du G7 prennent néanmoins leurs propres mesures pour aborder la question de l’IA.
En Macédoine du Nord, par exemple, un groupe de travail a été créé en septembre 2021 à l’initiative du Fonds pour l’innovation et le développement technologique (FITD) afin d’élaborer la première stratégie nationale en matière d’intelligence artificielle. Le pays accueillera également à Skopje, le 14 novembre, la 6e conférence régionale sur le commerce électronique, qui sera axée sur l’exploitation du potentiel de l’IA. Les représentants d’entreprises telles que Nestlé, Meta, Zalando, Allegro et Reebok, notamment, y prendront la parole. Plus de 600 entrepreneurs, e-commerçants, chefs d’entreprise et représentants gouvernementaux de Macédoine du Nord, d’Albanie, de Bosnie-Herzégovine, de Bulgarie, de Croatie, du Kosovo, du Monténégro, de Roumanie et de Serbie sont attendus à l’événement.
Entre-temps, l’Albanie compte participer au « programme pour une Europe numérique » (DIGITAL) de l’Union européenne, qui doit être mis en œuvre jusqu’en 2027. Le gouvernement albanais a déjà approuvé le projet de loi ratifiant l’accord entre la République d’Albanie et l’Union européenne sur la participation à ce programme, une ratification actuellement en cours d’approbation par les commissions du Parlement albanais.
Pour en savoir plus, vous pouvez consulter notre dernier article clé sur l’IA ici.
Cet article est publié hebdomadaire. Le contenu est basé sur des nouvelles des agences participantes au sein de la enr.