Le 19 septembre 2019, le Parlement européen (PE) a publié une résolution condamnant les manifestations des « idéologies totalitaires, telles que le nazisme et le stalinisme » dans l’Union européenne. Depuis, des publications sur les réseaux sociaux citent ce texte pour affirmer que l’Espagne est obligée de retirer de l’espace public les symboles liés aux communistes et les signes de reconnaissance à leur égard. Le même message a été publié plus de 500 fois depuis le 21 août 2023. Toutefois, la résolution n’est pas « contraignante », a assuré à l’AFP le service de presse du PE, qui a décrit le texte comme une « déclaration » politique.
"Le Parlement européen condamne le communisme et le stalinisme et oblige l'État espagnol à retirer signes de reconnaissance, hommages et noms de rue à tous ses agents en Espagne (Carrillo, Pasionaria, Negrín, Largo Caballero, Brigades internationales...)", affirment les utilisateurs des réseaux sociaux. Selon la publication, il s'agit d'une décision approuvée « aujourd'hui » à Strasbourg, où se trouve le siège du Parlement européen, et qui est « obligatoire ».
Le même message a été diffusé des centaines de fois sur Facebook (1, 2) et Twitter, désormais appelé X (1, 2). Or cette alerte a déjà circulé en 2019, 2020, 2021 et 2022.
Mémoire historique
Les utilisateurs attachent à ce message un lien vers la résolution du Parlement européen sur l'importance de la mémoire historique européenne pour l'avenir de l'Europe (2019/2819 (RSP). Le texte a été approuvé le 19 septembre 2019 par 535 voix pour, 66 contre et 52 abstentions.
L'initiative a été lancée par cinq groupes politiques représentés au Parlement européen (Parti populaire européen, Alliance progressiste des Socialistes et Démocrates, Renew Europe, Verts/ALE et Conservateurs et réformistes européens) . La résolution « demande » aux États membres de procéder à une « évaluation claire et fondée sur les principes des crimes et actes d’agression commis par les régimes communistes totalitaires et le régime nazi ». En outre, elle « condamne toute manifestation et propagation d’idéologies totalitaires, telles que le nazisme et le stalinisme ».
La résolution appelle également les pays membres à célébrer le 23 août une Journée européenne des victimes du stalinisme et du nazisme, et à condamner et combattre toutes les formes de négation de l'Holocauste.
Au point 17, le PE « exprime sa préoccupation quant au fait que les symboles des régimes totalitaires continuent d’être utilisés dans la sphère publique et à des fins commerciales ». Le même passage rappelle que "plusieurs pays européens ont interdit l'usage des symboles nazis et communistes".
L'équipe de vérification de l'AFP n'a pas trouvé dans la résolution une mention expresse selon laquelle des pays comme l'Espagne devraient retirer des lieux publics les expressions de reconnaissance à l’égard des personnalités communistes ou rendre compte dans les établissements d’enseignement et à la télévision des « crimes du communisme », comme l’affirment les publications virales. Nous n’en avons pas trouvé non plus dans le résumé du texte en anglais.
En 2019, aucun article n'a été trouvé dans la presse espagnole sur le caractère obligatoire auquel les utilisateurs font référence.
Consulté par AFP Factual, le service de presse du PE assurait le 4 septembre 2023 que la résolution "est une déclaration politique", mais "elle n'est pas contraignante". Les Etats membres ne sont donc pas obligés d'obéir à ces demandes, énumérées dans ce texte à l'occasion du 80e anniversaire du pacte de non-agression germano-soviétique, déclencheur de la Seconde Guerre mondiale.
Il existe différents types de législation dans l'Union européenne. D’une part, il y a les règlements, directives et décisions, tous trois contraignants et devant être respectés une fois approuvés. D'autre part, il existe d'autres mécanismes tels que les recommandations et les avis, qui sont des instruments non contraignants, sans conséquences juridiques, mais qui permettent aux institutions européennes de faire connaître leur point de vue et de suggérer des pistes d'action sans imposer d'obligations légales. C'est le cas des manifestations d'idéologies totalitaires.