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La semaine dernière, l’UE a annoncé des enquêtes sur les fournisseurs chinois d’éoliennes en Espagne, en Grèce, en France, en Roumanie et en Bulgarie. C’est la dernière d’une série de mesures prises par Bruxelles visant des subventions aux technologies vertes, soupçonnées de porter atteinte à une concurrence loyale. 

La commissaire à la Concurrence et vice-présidente exécutive de la Commission européenne, Margrethe Vestager, l’a annoncé lors d’un discours aux Etats-Unis, à l’Institute for Advanced Study de Princeton, dans le New Jersey. 

« La Chine est pour nous à la fois un partenaire dans la lutte contre le changement climatique, un concurrent économique et un rival systémique. Et les deux dernières dimensions convergent de plus en plus », a déclaré Mme Vestager. 

Selon le groupe de pression industriel WindEurope, les éoliennes chinoises sont actuellement proposées en Europe à des prix jusqu’à 50 % inférieurs à ceux des installations de fabrication européenne, à un moment où Bruxelles cherche à développer considérablement les énergies renouvelables pour atteindre le niveau zéro des émissions de gaz à effet de serre d’ici 2050. Dans sa production d’énergies renouvelables, l’UE cherche à réduire sa dépendance excessive d’une technologie chinoise meilleur marché. 

En Espagne, par exemple, le groupe China Three Gorges est impliqué dans le processus d’acquisition de deux grands projets d’énergies renouvelables en cours sur le marché espagnol, qui représentent ensemble environ 1 500 MW d’énergie verte. Dans les deux cas, le groupe chinois est en concurrence avec des poids lourds européens, comme Naturgy, Engie ou Verbund. 

Vendredi, le ministre chinois du Commerce a accusé la Commission européenne de poursuivre des actions « protectionnistes » au détriment des initiatives vertes en ouvrant des enquêtes sur les subventions chinoises. 

« Nous ne pouvons pas comprendre comment la Commission européenne, d’un côté, porte le drapeau du développement durable vert et, de l’autre, entreprend des opérations protectionnistes », a déclaré Wang Wentao, lors d’un forum économique italo-chinois à Vérone. 

Paris : « L’Europe doit retrouver sa puissance économique » 

Craignant l’impact sur leurs propres économies, l’UE et les États-Unis surveillent de près l’avance économique croissante de Pékin. 

« Nos économies ne peuvent pas absorber cela. Ce n’est pas seulement dangereux pour notre compétitivité. Cela met également en péril notre sécurité économique. Nous avons vu comment les dépendances unilatérales peuvent être utilisées contre nous. Et c’est pourquoi l’Europe, et pas seulement les États-Unis, réagit », a déclaré Mme Vestager dans le New Jersey. 

L’enquête de l’UE sur les parcs éoliens fait suite aux récentes critiques des États-Unis concernant la capacité industrielle excédentaire de la Chine. La secrétaire américaine au Trésor, Janet Yellen, a récemment déclaré que Washington « n’accepterait pas » que des produits chinois vendus à perte inondent le marché mondial. 

Les États-Unis craignent que les subventions de Pékin ne conduisent à une capacité de production supérieure à ce que les marchés mondiaux peuvent absorber, ce qui entraînerait une augmentation des exportations bon marché dans des secteurs tels que le solaire et les véhicules électriques et étoufferait ainsi la croissance de ces industries ailleurs.

La semaine dernière, les ministres de l’Économie d’Allemagne, de France et d’Italie – les trois plus importantes économies de la zone euro – se sont retrouvés près de Paris pour leur troisième réunion trilatérale sur la puissance économique de l’Europe et les défis actuels en matière de sécurité économique – y compris ceux venant de Chine. 

« L’Europe doit retrouver sa puissance économique, elle doit renouer avec le risque et l’innovation, et elle doit retrouver la prospérité », a déclaré le ministre français de l’Economie et des Finances, Bruno Le Maire. « Personne ne peut accepter que les Européens voient leur prospérité relative diminuée par rapport à celle des Américains. » Il a ajouté que la Chine et les États-Unis « n’accorderont aucun rabais à l’Europe » et a souligné qu’« il n’y avait pas une seconde à perdre » pour définir une stratégie économique de l’UE. 

Trains électriques en Bulgarie, panneaux solaires en Roumanie

Les nouvelles enquêtes sur les éoliennes font suite à des investigations antérieures de l’UE sur les subventions chinoises aux panneaux solaires, aux voitures électriques et aux trains, alors que les tensions commerciales avec Pékin s’intensifient. L’initiative a été lancée dans le cadre de nouvelles règles entrées en vigueur l’année dernière et qui visent à empêcher les subventions étrangères de nuire à une concurrence loyale au sein de l’UE. 

L’UE a ouvert en février sa première enquête au titre du règlement sur les subventions étrangères, ciblant une filiale du géant ferroviaire chinois CRRC, qui a participé à un appel d’offres en Bulgarie pour la fourniture de trains électriques.Cette enquête a été close lorsque la société chinoise s’est retirée de l’appel d’offres. 

Une deuxième enquête cible les fabricants chinois de panneaux solaires qui cherchent à construire et à exploiter un parc photovoltaïque en Roumanie, en partie financé par des fonds européens. 

« La semaine dernière, nous avons ouvert des enquêtes sur les offres d’entreprises chinoises qui pourraient avoir été indûment avantagées dans les appels d’offres publics pour les panneaux solaires en Roumanie », a déclaré Mme Vestager dans son discours à Princeton. 

En vertu du règlement de l’UE sur les subventions étrangères, les entreprises sont tenues de notifier leur participation aux appels d’offres publics dans l’UE lorsque la valeur estimée du contrat dépasse 250 millions d’euros et lorsqu’elles ont reçu des contributions financières étrangères d’au moins quatre millions d’euros d’au moins un pays tiers au cours des trois années précédant la notification. 

Le règlement sur les subventions étrangères est entré en vigueur le 12 juillet 2023. Il permet à la Commission de lutter contre les distorsions causées par les subventions étrangères et donc à l’UE de garantir des conditions de concurrence équitables pour toutes les entreprises qui exercent leur activité sur le marché intérieur, tout en restant ouverte au commerce et aux investissements. 

Après l’examen préliminaire de tous les dossiers, la Commission a estimé qu’il était justifié d’ouvrir une enquête poussée sur deux soumissionnaires de l’appel d’offres roumain : il existait des indications suffisantes selon lesquelles tous deux avaient reçu des subventions étrangères faussant le marché intérieur.

Un véhicule électrique est branché sur une borne de recharge. (Photo : Eduardo Parra / Europa Press, photo d’archives)

Importations des véhicules électriques : toujours dans l’impasse 

Dans son discours à Princeton, Mme Vestager a également évoqué les préoccupations de longue date de l’UE concernant la concurrence déloyale des constructeurs chinois de véhicules électriques. 

« En octobre de l’année dernière, la Commission européenne a lancé une enquête antisubventions sur l’importation de véhicules électriques en provenance de Chine. Si nous déterminons que ces voitures électriques ont été subventionnées illégalement, nous imposerons des mesures correctives », a-t-elle déclaré. 

Selon la Commission, les voitures électriques chinoises sont généralement environ 20 % moins chères que les modèles fabriqués dans l’UE. L’enquête antisubventions pourrait désormais conduire à l’imposition de droits de douane punitifs. 

La semaine dernière, les constructeurs automobiles allemands ont déclaré qu’ils s’opposaient à d’éventuels droits de douane punitifs européens sur l’importation de voitures électriques en provenance de Chine. L’Association allemande de l’industrie automobile (VDA) a appelé au dialogue afin d’éviter de nuire au développement du secteur.

« Les mesures antisubventions, telles que des droits de douane supplémentaires, ne résoudraient pas les défis auxquels est confrontées l’industrie automobile européenne et allemande. Au contraire : l’application des droits compensateurs envisagé par la Commission européenne pourrait rapidement avoir un impact négatif en cas de conflit commercial », a déclaré la présidente du VDA, Hildegard Müller, dans l’édition dominicale du journal allemand Die Welt. 

Selon le Centre allemand de recherche sur l’automobile, les constructeurs allemands vendent entre 30 et 40 % de leur production sur le marché chinois. En cas de tarifs douaniers punitifs européens, ces constructeurs pourraient donc être la première cible d’éventuelles contre-mesures de Pékin. 

Une annonce préliminaire de la Commission est prévue d’ici le 5 juin, rapporte le journal. 

Cet article est publié chaque semaine. Le contenu est basé sur les informations des agences participant à l’ENR.