Les chefs d’État et de gouvernement de l’UE et des Balkans occidentaux se sont réunis à Bruxelles le 13 décembre, un an après le sommet de Tirana. L’objectif de cette conférence était de rapprocher les Balkans occidentaux de l’UE, de promouvoir l’intégration politique, de poser les bases d’une économie future et de réduire l’impact de la guerre d’agression russe en Ukraine.
La présidente du Parlement européen, Roberta Metsola, a déclaré mercredi que par rapport aux années précédentes, il existait pour la première fois un accord entre les États membres de l’UE pour se préparer à l’élargissement. Mme Metsola a également rappelé que la Commission européenne avait recommandé l’ouverture sous conditions des négociations d’adhésion avec la Bosnie-Herzégovine (BiH).
Lors du sommet du 14 décembre, les dirigeants européens ont décidé d’ouvrir les négociations d’adhésion avec l’Ukraine et la Moldavie et ont approuvé le statut de candidat de la Géorgie. En outre, ils ont décidé d’ouvrir les négociations avec la Bosnie-Herzégovine « dès que le niveau requis de consensus sur les critères d’adhésion aura été atteint, et ont demandé à la Commission de présenter un rapport d’ici le mois de mars afin qu’une telle décision puisse être prise », a annoncé le président du Conseil européen, Charles Michel, sur la plateforme X.
Mercredi, il a déclaré que les pays des Balkans occidentaux devraient entreprendre des réformes supplémentaires avant d’être admis dans l’Union européenne. « Nous attendons d’eux qu’ils poursuivent leurs réformes, notamment en ce qui concerne l’État de droit et l’indépendance du pouvoir judiciaire. » Il a toutefois ajouté qu’il y avait dans la région une « forte détermination politique » à mettre en œuvre les réformes nécessaires.
Golob : « L’élargissement de l’UE doit être considéré d’un point de vue géopolitique. »
La Slovénie est depuis longtemps un fervent partisan de l’adhésion de la BiH à l’UE. Le Premier ministre slovène Robert Golob a déclaré que le pays devrait être traité au sein d’un paquet avec l’Ukraine et la Moldavie. À la veille du sommet de mercredi, Golob a appelé les dirigeants européens à garder la géopolitique à l’esprit. « La question de l’élargissement doit être considérée d’un point de vue géopolitique et [les pays doivent] si possible être traités par paquets », a-t-il déclaré.
En route pour Bruxelles, Golob a fait une escale à Paris pour s’entretenir avec le président Emmanuel Macron. À la question de savoir si Macron soutenait l’initiative slovène d’accorder aujourd’hui le statut de candidat à la Bosnie, il a répondu que c’était à Macron de répondre. « Mais en principe, nous défendons la même position », a précisé Golob.
La Slovénie fait partie, avec l’Autriche, la Croatie, la République tchèque, la Grèce, l’Italie et la Slovaquie, du groupe dit des « Amis des Balkans occidentaux », qui s’engage pour envoyer des signaux plus forts à la région.
Jeudi, le Premier ministre croate Andrej Plenković a déclaré que la Bosnie-Herzégovine avait désormais reçu un signal politique fort et un calendrier clair pour l’ouverture des négociations d’adhésion en mars prochain. Plenković a ajouté qu’il s’agissait d’une excellente incitation pour le Conseil des ministres de Bosnie-Herzégovine présidé par Borjana Krišto, avec laquelle il a été en contact toute la journée, à prendre de nouvelles mesures importantes au cours des deux prochains mois afin de remplir les critères requis.
Les dirigeants de l’UE ont entériné cette décision avec une rapidité inattendue après que le Premier ministre hongrois Viktor Orbán a renoncé à son veto, s’abstenant de voter en quittant la salle pendant le scrutin.
L’Italie a demandé un signal pour la Bosnie-Herzégovine
La décision d’ouvrir les négociations avec la BiH dès que les critères d’adhésion nécessaires seraient remplis a aussi été fermement soutenue par l’Italie. Dans les jours qui l’ont précédée, l’Italie avait demandé qu’un « signal clair » soit envoyé à la BiH. Pour Rome, il ne suffit pas d’affirmer dans la déclaration que « l’UE est prête » à ouvrir des négociations avec Sarajevo.
Entre-temps, le Conseil des affaires générales a salué dans ses conclusions les efforts de réforme entrepris par la Bosnie-Herzégovine après l’obtention du statut de candidat en décembre 2022. Il a souligné qu’en dépit de l’évolution négative de la situation dans l’entité Republika Srpska, certaines mesures et certains engagements importants avaient été pris en vue de répondre aux principales priorités. Comme indiqué précédemment, le Conseil a encouragé la poursuite des progrès en matière de réformes et souligné l’importance de veiller à ce que toutes les lois adoptées soient pleinement conformes à l’acquis de l’UE et aux normes européennes.
Le président du collège présidentiel de Bosnie-Herzégovine, Željko Komšić, a déclaré dans son discours au sommet de Bruxelles que la réalisation de 14 priorités clés figurant dans l’avis de la Commission européenne de mai 2019 était essentielle à la poursuite des progrès de la Bosnie-Herzégovine.
D’autres pays dans la file d’attente
Les autres pays voisins – Albanie, Kosovo, Monténégro, Macédoine du Nord et Serbie – ont également l’ambition de rejoindre l’UE mais sont confrontés à des procédures d’adhésion longues et méticuleuses.
Le Monténégro, considéré comme le leader, a entamé des discussions en 2012, suivi par la Serbie en 2014. Cependant, ces deux pays sont encore loin d’aligner complètement leurs lois et leurs normes sur celles de l’UE.
L’Albanie et la Macédoine du Nord ont entamé des discussions d’adhésion l’année dernière, plus d’une décennie après avoir déposé une demande d’adhésion.
Le cas du Kosovo est compliqué par le fait que cinq pays de l’UE n’ont pas reconnu son indépendance après que le Kosovo s’est séparé de la Serbie en 2008.
Le Premier ministre de Macédoine du Nord, Dimitar Kovačevski, a déclaré que la Macédoine du Nord avait achevé la procédure de screening validée par l’UE, ajoutant toutefois : « Nous savons tous qu’il nous reste une tâche à accomplir. » La Macédoine du Nord doit encore modifier sa constitution en y ajoutant une référence à l’existence d’une minorité ethnique bulgare, afin de résoudre le problème déjà ancien avec la Bulgarie voisine. Il a précisé, avant le sommet UE-Balkans occidentaux de mercredi à Bruxelles, que « le projet de conclusions est très clair et nous allons certainement progresser dans les réformes, alors que le processus d’amendements constitutionnels est inévitable. » « Cela dépend maintenant de nous, mais la discussion va certainement se poursuivre », a conclu M. Kovačevski.
Le Premier ministre bulgare Nikolay Denkov a déclaré plus tôt au sujet de l’adhésion de la Macédoine du Nord à l’UE que la Bulgarie soutenait l’élargissement de l’UE aux pays des Balkans occidentaux. Elle a toutefois mis son veto à l’adhésion de la Macédoine du Nord à l’UE en raison de différends historiques, culturels et linguistiques. Sofia a demandé à Skopje de mettre en œuvre le traité d’amitié, de bon voisinage et de coopération entre les deux pays. Cela implique notamment d’accepter les modifications qui prévoient l’intégration des Bulgares dans la constitution de la Macédoine du Nord. Ces amendements, élaborés par le gouvernement de Macédoine du Nord, ont déjà été amplement discutés mais pas encore adoptés par le Parlement.
La Serbie approuve la déclaration et rejette les sanctions contre la Russie
« C’est une bonne chose que le sommet UE-Balkans occidentaux existe, car en plus de la communauté politique européenne, c’est un nouveau format dans lequel nous, les pays des Balkans occidentaux, pouvons toujours discuter ouvertement, honnêtement et de manière totalement transparente avec les dirigeants de l’UE », a déclaré la Première ministre serbe Ana Brnabić aux journalistes.
Le président du Conseil européen, Charles Michel, a appelé les pays des Balkans occidentaux à s’aligner pleinement sur la politique étrangère et de sécurité de l’UE. Il a aussi fait référence à l’application des sanctions, la Serbie refusant d’adopter celles imposées à la Russie suite à l’invasion de l’Ukraine alors qu’elle est candidate à l’adhésion. Mme Brnabić a déclaré qu’en ce qui concerne les valeurs de l’Union européenne, la Serbie était d’accord avec la déclaration de l’UE. Cependant, en matière de sanctions contre la Russie, Mme Brnabić a précisé que le peuple serbe était opposé à l’introduction de tout type de sanctions « parce que nous avons souffert de sanctions dans les années 1990. Nous pensons que les sanctions nuisent toujours aux membres les plus vulnérables de la population ».
Borrell : « Tenir les promesses, éviter les frustrations. »
Le chef de la politique extérieure de l’UE, Josep Borrell, a regretté la lenteur des progrès des procédures d’adhésion. « Nous devons tenir nos promesses, éviter les frustrations et répondre aux attentes que nous avons suscitées », a-t-il déclaré.
« Les négociations d’adhésion constituent une partie de nos efforts de rapprochement vers les Balkans occidentaux, mais l’autre partie est l’économie », a déclaré la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, après la réunion. « Si l’on regarde les économies des pays des Balkans occidentaux, elles se situent aujourd’hui à environ 35 % de la moyenne de l’UE. En d’autres termes, il y a beaucoup de potentiel inexploité », a-t-elle ajouté.
« Une centrale photovoltaïque en Albanie ou un chemin de fer au Monténégro, par exemple : ce sont là des projets que nous faisons avancer, a expliqué von der Leyen. Enfin, il y a les jeunes, ce qu’il y a de plus précieux dans nos vies. En octobre, nous avons eu le plaisir et l’honneur d’inaugurer le bureau local du College of Europe à Tirana. Je peux vous confirmer que 500 étudiants ont déjà posé leur candidature pour faire des études l’année prochaine. L’Union européenne financera 15 bourses. »
La coopération économique et les investissements ciblés dans les infrastructures telles que les routes, le chemin de fer, Internet et les réseaux de fourniture en électricité devraient stimuler l’économie de la région. La Commission a annoncé un nouveau paquet d’investissement de 680 millions d’euros pour des projets dans les domaines du transport ferroviaire et des énergies renouvelables dans les États des Balkans occidentaux.
Alors que les pays attendent encore leur adhésion à l’UE, il faut que les personnes et les entreprises « ressentent le plus rapidement possible les effets positifs de cet engagement dans l’UE », a déclaré M. Michel. L’UE souhaite encourager « plus d’investissements » et « plus de développement économique », a-t-il précisé. Un fonds proposé d’une valeur pouvant atteindre 6 milliards d’euros est toutefois entravé par un débat interne à l’UE sur la révision du budget commun de l’Union.
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