Santa Cruz de Tenerife – Le président de la région des Canaries, Fernando Clavijo, a proposé à son homologue de Madère, Miguel Albuquerque, d’articuler un front commun des neuf régions ultrapériphériques (RUP) pour lutter avec unité en défense de leur statut spécifique dans l’UE, quelque chose de crucial face à « la menace » du nouveau cadre financier pluriannuel.
Dans une lettre en réponse à celle envoyée par le président de Madère, Fernando Clavijo a invité le reste des territoires couverts par l’article 349 du Traité à répondre « de manière coordonnée et comme une seule voix » face à une proposition de cadre financier pluriannuel 2028-2034 qui « compromet le développement économique et social » des RUP.
Le titulaire du gouvernement canarien partage pleinement avec celui de Madère l’inquiétude générée par le contenu du document élaboré par la Commission européenne, un texte législatif et financier qui laisse à chaque État le soin de répartir les fonds européens et élimine « les poches de ressources spécifiques » pour les RUP, qui ont été respectées dans tous les budgets précédents de l’UE.
Pour cette raison, Fernando Clavijo alerte que l’application de la proposition présentée par Bruxelles le 16 juillet dernier constitue “un pas en arrière inacceptable par rapport au traitement spécifique que les régions ultrapériphériques ont jusqu’à présent reçu pour atténuer leurs évidentes désavantages, des droits reconnus qui sont respectés depuis des décennies dans l’UE”, selon ce qu’a informé ce lundi le gouvernement des Canaries.
En particulier, le président des Canaries s’accorde avec son homologue portugais pour dénoncer la “gravité” des conséquences que l’omission de mesures spécifiques reconnaissant les limitations structurelles et permanentes affectant nos régions ultrapériphériques aurait sur les RUP.
À son avis, “l’absence d’allocations supplémentaires dans le FEDER et le FSE+, ainsi que le manque d’une ligne budgétaire dédiée au Posei et aux aides pour les coûts supplémentaires dans le secteur de la pêche, constituent des reculs inacceptables qui compromettent le développement économique et social de nos territoires”.
Clavijo indique dans sa lettre à Albuquerque que, face à cette “menace”, les neuf RUP et leurs trois États -Espagne, France et Portugal- doivent “répondre avec détermination et rapidité, mais surtout avec unité pour défendre nos intérêts communs”.
Pour cela, le chef du gouvernement autonome propose au président de Madère la création d’un front permettant “d’articuler une position conjointe devant les institutions européennes, dans le but de garantir un traitement juste, cohérent et stable pour toutes les RUP dans le cadre financier et législatif futur”.
L’objectif, ajoute Clavijo dans sa lettre, est de travailler pour que les RUP continuent d’être considérées en bloc comme des régions nécessitant un traitement et des fonds spécifiques.
“Je suis convaincu que ce n’est qu’à travers l’unité et la fermeté que nous pourrons faire en sorte que l’Union européenne maintienne son engagement envers nos régions, comme le stipule l’article 349 du Traité”, explique le président, pour garantir que le gouvernement des Canaries est “pleinement disposé à collaborer à cette initiative et à contribuer activement à l’élaboration d’une stratégie conjointe qui nous permette de défendre nos droits et nos besoins”.
Les Canaries ont déjà transmis leur préoccupation à Von der Leyen
La réponse à la lettre que le président de Madère a envoyée la semaine dernière s’ajoute à celle que Fernando Clavijo a envoyée le 31 juillet dernier à la présidente de la Commission européenne, Ursula Von der Leyen.
Dans cette missive, le titulaire de l’exécutif canarien transmettait à la dirigeante européenne sa “profonde préoccupation” concernant le contenu du nouveau Cadre Financier Pluriannuel et les effets négatifs que son application aurait sur l’archipel, demandant ainsi le blindage des fonds directs aux régions ultrapériphériques.
Clavijo alertait Von der Leyen que la proposition de cadre financier de l’UE pour la période 2028-2034 laisse aux États le soin de répartir les ressources, ce qui “annule 50 ans d’une politique de cohésion construite avec et pour les régions européennes qui sont les plus proches des citoyens et qui ont su utiliser ces fonds européens pour améliorer la convergence économique et la qualité de vie de leurs citoyens”.
Ce changement de modèle laisse en suspens, en fonction de ce que décidera l’État, les fonds que l’archipel avait garantis en tant que RUP.
Dans le cadre financier 2021-2027, les Canaries ont directement attribués un peu plus de 4.600 millions d’euros en raison de leur statut de région ultrapériphérique.
De plus, du Fonds Européen de Développement Régional (FEDER) et du Fonds Social Européen (FSE), les îles reçoivent durant la période budgétaire en cours 2.730 millions d’euros, tandis que dans le Programme d’Options Spécifiques pour l’Éloignement et l’Insularité (Posei), 1.878 millions d’euros sont prévus. (11 juillet)