Les ministres des Affaires étrangères et de la Défense de l’UE ont discuté du soutien à l’Ukraine – à la suite de l’approbation par les législateurs américains d’un programme d’aide de près de 61 milliards de dollars – ainsi que des sanctions contre l’Iran pour son attaque contre Israël et son soutien militaire de la Russie.
Les ministres ont chargé le haut représentant de l’UE pour les affaires étrangères et la sécurité, Josep Borrell, de présenter des propositions concrètes de sanctions. Celles-ci devraient permettre d’imposer de nouvelles restrictions commerciales à l’Iran afin de rendre plus difficile la construction et le développement de drones et de missiles par ce pays. Il est également prévu de sanctionner des individus, des organisations et des entreprises.
« Nous sommes parvenus à un accord politique afin d’élargir et d’étendre le régime [de sanctions] existant contre les drones afin de viser les missiles et leur transfert potentiel vers la Russie», a indiqué Borrell.
Les sanctions s’étendront à la production et aux expéditions de drones et de missiles non seulement vers la Russie, mais également vers l’ensemble du Moyen-Orient et de la région de la mer Rouge, a-t-il ajouté. Les ministres ont également convenu d’élargir la liste des matériels composants de drones qu’il est interdit aux États membres d’exporter vers l’Iran.
Un premier accord politique de principe sur de nouvelles sanctions contre l’Iran avait déjà été conclu la semaine dernière à la suite de la récente escalade du conflit entre Israël et l’Iran. Les chefs d’État et de gouvernement présents au Conseil de l’UE avaient ensuite déclaré que « l’Union européenne prendrait de nouvelles mesures restrictives contre l’Iran, notamment en ce qui concerne les drones et les missiles ». L’Iran avait reconnu en novembre 2022 avoir livré des drones à la Russie avant son invasion de l’Ukraine.
En marge du sommet, le Premier ministre slovène Robert Golob a souligné que « la seule façon de parvenir à la paix est que nous commencions tous à prendre conscience ensemble de notre responsabilité. C’est la position que nous continuerons à défendre, non seulement au Moyen-Orient, mais aussi à l’égard de l’Ukraine et de la Russie. »
Le 23 avril, le ministre iranien des Affaires étrangères Hossein Amir-Abdollahian a condamné les sanctions prévues contre son pays pour l’attaque à grande échelle contre Israël comme « illégales » et « regrettables ». L’Iran a exercé son droit de légitime défense par cette attaque, a écrit Amir-Abdollahian sur X. Il a appelé à prendre des sanctions plutôt contre Israël.
Pourquoi les tensions montent ?
La région est plongée dans la tourmente depuis le 7 octobre, jour où des militants du Hamas ont lancé une attaque qui a fait 1.170 morts dans le sud d’Israël, pour la plupart des civils, selon un décompte de l’AFP basé sur des chiffres officiels israéliens.
L’offensive de représailles d’Israël a tué au moins 34 012 personnes à Gaza, pour la plupart des femmes et des enfants, a annoncé le ministère de la Santé du territoire le 19 avril.
Les dirigeants mondiaux, les politiciens, les ONG et les civils appellent depuis des mois à un cessez-le-feu.
Le puissant mouvement libanais Hezbollah, soutenu par l’Iran, s’est engagé dans des échanges de tirs quasi quotidiens avec Israël depuis le début de la guerre. Il y a également eu une recrudescence des violences impliquant des groupes alliés de Téhéran en Irak, au Yémen et en Syrie.
Fin décembre, l’Afrique du Sud a porté plainte contre Israël devant la Cour internationale de Justice, l’accusant d’avoir violé la Convention sur le génocide pendant la guerre en cours à Gaza. Dans une décision provisoire, le tribunal de l’ONU a ordonné à Israël de prendre des mesures de protection pour empêcher tout génocide.
Le spectre d’une guerre régionale n’a fait que se renforcer après la toute première attaque directe de l’Iran contre Israël les 13 et 14 avril, en représailles à une frappe aérienne meurtrière contre le consulat de la République islamique à Damas, la capitale syrienne, le 1er avril, qui a été largement imputée à Israël. Deux généraux et cinq autres membres du Corps des Gardiens de la révolution islamique (CGRI), l’armée idéologique de la République islamique, figuraient parmi les personnes tuées.
Israël a déclaré que l’Iran avait lancé « plus de 350 menaces, missiles balistiques, missiles de croisière, roquettes et drones suicides ». Presque tous ont été interceptés par Israël et d’autres pays, notamment les États-Unis, la Grande-Bretagne et la France.
Au milieu de ces tensions accrues, certains pays, telle la Macédoine du Nord, ont mis en place des mesures pour rapatrier leurs citoyens d’Israël et du Moyen-Orient si nécessaire.
Le 19 avril, des explosions ont été signalées tôt le matin dans le centre de l’Iran, et des hauts responsables américains cités dans les médias auraient déclaré qu’Israël ripostait.
Le 14 avril, l’ambassadeur d’Israël auprès des Nations Unies, Gilad Erdan, a exhorté le Conseil de sécurité à désigner les Gardiens de la révolution comme organisation « terroriste » et à « imposer toutes les sanctions possibles à l’Iran avant qu’il ne soit trop tard ». L’envoyé iranien auprès de l’ONU a déclaré que Téhéran n’avait « pas d’autre choix » que de répondre à l’attaque du 1er avril.
Appels à inscrire les Gardiens de la révolution sur la liste des organisations terroristes de l’UE
Lors de la réunion de lundi, la possibilité d’inclure le CGRI – une branche des forces armées iraniennes – sur la liste des organisations terroristes de l’UE a également été discutée.
Le ministre fédéral autrichien des Affaires européennes et internationales, Alexander Schallenberg, s’y est déclaré favorable « si c’est possible ». Cependant, a-t-il ajouté, c’est quelque chose que l’UE « fait déjà » de facto, ayant sanctionné individuellement plusieurs de ses membres.
Désigner la branche des forces armées iraniennes comme organisation terroriste pose un problème. Le CGRI devrait d’abord être poursuivi par une autorité nationale pour activités terroristes en vertu du droit de l’UE pour que cette sanction soit imposée.
Les responsables de l’UE examinent actuellement une récente décision de justice de Düsseldorf, en Allemagne, concernant les activités du CGRI. Cela pourrait ouvrir la voie à la désignation du CGRI comme organisation terroriste.
La ministre belge des Affaires étrangères Hadja Lahbib a déclaré qu’elle soutenait l’extension des sanctions contre les Gardiens de la révolution.
Le ministre lituanien Gabrielius Landsbergis s’est déclaré favorable à une restriction de l’industrie militaire d’un pays qui « se bat sur deux fronts ». « Combien de fronts l’Iran doit-il ouvrir pour que nous puissions sérieusement envisager de les sanctionner ? », a-t-il demandé, citant l’implication du régime islamiste en Ukraine et son attaque contre Israël.
En Suède, le parlement a officiellement décidé l’année dernière d’ordonner au gouvernement de faire pression pour inscrire le CGRI sur la liste européenne des organisations terroristes.
Examen de nouvelles sanctions de l’UE contre les colons israéliens violents
Le chef de la diplomatie européenne Borrell a déclaré lundi que l’UE aborderait à nouveau les sanctions contre les colons israéliens responsables des violences contre les Palestiniens en Cisjordanie.
Vendredi, l’Union européenne a imposé des sanctions à quatre colons israéliens et à deux groupes de militants israéliens « extrémistes » pour les violences commises contre les Palestiniens en Cisjordanie et à Jérusalem.
« Les attaques contre les Palestiniens se multiplient également en Cisjordanie. Nous devrons réexaminer les sanctions contre les colons violents. La semaine dernière, nous avons approuvé un petit ensemble de mesures », a déclaré Borrell à la presse à son arrivée au Conseil des ministres européens des Affaires étrangères et de la Défense.
Si la ministre belge des Affaires étrangères Hadja Lahbib a soutenu l’idée d’examiner davantage de sanctions contre les colons israéliens, elle a jugé cela insuffisant, demandant d’aller plus loin et de sanctionner également ceux qui arment et défendent les colons violents. « C’est tout le système qui doit être affecté », a-t-elle déclaré.
Les négociations de cessez-le-feu sont au point mort, mais « l’espoir n’est pas perdu »
Concernant la situation à Gaza, Borrell a déclaré après la réunion de lundi qu’« il n’y avait aucun progrès pour la libération des otages, il n’y avait aucune perspective de cessez-le-feu et il n’y avait pas de véritable apaisement de la catastrophe humanitaire ».
Selon lui, le commissaire européen chargé de la gestion des crises, Janez Lenarcic, avait fourni « quelques exemples de la manière dont l’aide humanitaire est entravée », en dépit du fait que l’UE appelle à un « accès sans entrave ».
« La catastrophe humanitaire pour le peuple palestinien continue. Je tiens à insister sur le fait qu’il n’y aura pas de stabilité durable dans la région tant que la guerre à Gaza se poursuivra », a souligné le chef de la diplomatie européenne.
Il a en outre indiqué que les ministres étaient convenus d’inviter le ministre israélien des Affaires étrangères ainsi que le nouveau Premier ministre palestinien au prochain Conseil des Affaires étrangères.
Le Premier ministre qatari, Cheikh Mohamed bin Abdelrahman bin Jassim Al Thani, dont le pays est un médiateur important dans la tentative de parvenir à un cessez-le-feu à Gaza, a déclaré lundi, lors du tout premier forum de sécurité de haut niveau entre l’UE et le Conseil de coopération du Golfe, qu’il n’a pas perdu l’espoir d’y parvenir, même si les négociations avec Israël et le Hamas n’ont pas encore donné de résultats.
Cet article est publié chaque semaine. Le contenu est basé sur les informations des agences participant à l’ENR.